Des réponses à vos questions

4 décembre 2024. La Riponne, plus grande place du canton, est en plein travaux.

Pourquoi lancer une initiative maintenant?

En janvier 2019, la Municipalité de Lausanne a donné le coup d’envoi du réaménagement des places de la Riponne et du Tunnel en lançant une démarche participative auprès de la population et un concours d’idées international en urbanisme. Les Lausannois-es attendaient depuis longtemps ce moment car ils rêvent qu’on redonne un visage plus reluisant à ces lieux incontournables de la ville. Nombre d’entre nous, inspirés par la Grenette disparue en 1933, avions l’espoir de voir renaître un marché couvert sur la place. Dans sa version contemporaine, il s’agit plutôt d’une halle gourmande. Un modèle qui rencontre le succès dans de nombreuses villes en Europe parmi les habitants-es comme les touristes.  

Le projet de concours Riponne-Tunnel qui a gagné le 1er prix, In-between, d’un bureau d’architecte catalan, répondait à ce vœu. Il prévoyait une MARKTHALL située dans le triangle tunnel-ancien Lausanne-Moudon-Brasserie du Château.

Malheureusement (ou heureusement?), le projet vainqueur du concours d’aménagement de la seule place du Tunnel (Delta-Delta), comme les deux autres sélectionnés pour la phase finale en décembre 2023, n’ont pas repris cette idée.

Place du Tunnel, au fond, le marché couvert MARKTHALL

Projet lauréat du bureau Silvia Gonzalez Porqueres et Andreu Pont Aineto, Reus (E)

La Riponne n’a toutefois pas fait l’objet d’un concours spécifique contrairement aux attentes pour la plus grande place du canton qualifiée régulièrement comme l’un des «plus grands échecs urbanistiques de l’histoire lausannoise». La Municipalité a sélectionné avant tout des bureaux de paysagistes pour des mandats d’étude parallèles (MEP) avec des lignes directrices déjà définies. L’idée d’un marché couvert sur cette place a ainsi été écartée, le cahier des charges prévoyant de conserver l’essentiel de la surface minéralisée «pour les grandes manifestations». 

C’est ainsi qu’après les grands travaux de consolidation de la dalle supérieure du parking, la place a été à nouveau recouverte de pavés en béton gris. Le projet du bureau Paysagestion, «Au soleil, sous la pluie», choisi par la ville le 1er mars 2025, prévoit de planter des arbres autour de la place, notamment sur le flanc en terrasses côté rue du Tunnel. 

En attendant le début des nouveaux travaux, prévus à partir de 2028, une fresque colorée, inaugurée le 13 septembre dernier, décore la place.  

Notre association regrette vivement cette opportunité manquée de réaliser le marché couvert. C’est pourquoi elle lance une initiative communale. Tout en précisant qu’ayant également imaginé une végétalisation du reste de la place, l’aménagement choisi par la ville peut être complémentaire autour d’une halle gourmande. Situé dans le prolongement des stands et des camionnettes du marché traditionnel, elle représenterait un trait d’union entre la Palud, le centre-ville et la future place du Tunnel réaménagée et très arborisée.

24 heures, 7 octobre 2020

Grégoire Junod, syndic de Lausanne

À propos du Concours d’idées Riponne-Tunnel

Les sept projets remarqués imaginent davantage de végétation, moins de places de parc, des espaces de jeu et des terrasses, tant à la Riponne qu’à la place du Tunnel. Le projet lauréat avait mis en valeur l’idée d’un marché couvert. «Ce sont des pistes intéressantes qui vont nourrir notre réflexion», dit Grégoire Junod.

Le projet de la Municipalité

Des arbres qui cachent un désert pavé de béton

Le projet du bureau Paysagestion « Au soleil, sous la pluie »

Comme le montre l’illustration du projet retenu, la place où devrait à nouveau s’installer le marché, derrière les arbres, reste essentiellement minéralisée. Marchands et clients « Au soleil, sous la pluie ».

Sur la photo de la place du 25 juin 2025, on observe que la Riponne a retrouvé son visage d’avant les grands travaux au dessus du parking. Avec le projet de la ville, la surface pavée conserverait cet aspect à l’avenir.

Un marché couvert, pour quelle raison?

Si Lausanne veut pérenniser son marché traditionnel, une toiture s’avèrera indispensable dans le contexte du changement climatique. De par sa grande surface de pavés en béton, la Riponne reste un vaste îlot de chaleur, difficilement supportable les jours de canicule pour les marchands et la clientèle. 

De plus, le marché est déserté les jours très froids en hiver ou par temps de pluies diluviennes, qui devraient se multiplier selon les experts. Le dernier samedi de septembre 2024 en est un exemple frappant: il n’y avait pratiquement personne dans les rues du centre-ville en raison des averses très abondantes en matinée.    

Aucun des projets sélectionnés par la Municipalité, présentés au public le 1er mars dernier, n’a pris en considération l’avenir du marché traditionnel, en grande difficulté depuis quelques années.

Il en va également de l’attractivité du centre ville historique où nombre de cafés souffrent du manque de clientèle. Quant aux petits commerces, ils sont nombreux à mettre la clé sous la porte. L’aménagement arborisé envisagé autour de la Riponne ne représenterait pas un motif de destination pour les non-résidents du quartier ni pour les touristes en regard de l’offre dans la ville. La place du Tunnel aura elle aussi la vocation d’un site de détente à l’ombre de nombreux arbres. Les parcs de Montbenon ou de Mont-Repos ne sont pas loin, de même que les espaces aménagés autour des arches du Grand-Pont.

Samedi 28 septembre 2024. De grosses averses tombent en matinée. Le marché est désert, les rares clients sont détrempés. Les marchands font grise mine.

Comment va-t-on le financer?

La ville de Lausanne a prévu de consacrer 20 millions de francs au projet final de réaménagement de la Riponne, y compris les futures constructions et les coûts d’entretien. Pour définir ce montant, elle a calculé un coût de 1000 francs X 20 000 m², représentant la surface entière de la Riponne. 

Les coûts des importants travaux de consolidation de la dalle supérieure du parking sont distincts et ont déjà été avalisés en partie par le Conseil communal. Le montant annoncé du chantier en février 2025, qui devrait encore évoluer, était de 23,3 millions de francs, dont 8,9 millions à la charge de la commune, le reste pour la société propriétaire du parking, Inovil SA (24 heures du 20.02.2025).  

Sans commune mesure avec les stades

Si on se réfère aux différents modèles à l’étranger, le coût de la construction d’une halle gourmande peut tenir aisément dans le montant réservé par la ville pour l’aménagement de la Riponne. Mais une telle réalisation doit être vue sous l’angle d’un investissement pour le futur de Lausanne – notamment pour son marché et le tourisme – si l’ambition est de faire de cet édifice un nouvel emblème architectural au coeur de la ville à l’image du Mercat Santa Caterina à Barcelone ou d’autres halles en Europe devenues de véritables cartes de visite pour les villes les plus audacieuses. 

Quoi qu’il en soit, on resterait très loin des investissements majeurs dans le patrimoine lausannois en ce siècle. Pour le complexe sportif et stade de glace de la Vaudoise Arena, qui a coûté 230 millions à ses différents propriétaires, Lausanne a cautionné un emprunt de 150 millions de francs et elle couvre l’essentiel du déficit d’exploitation annuel (12,9 millions de charges prévus en 2025 sur les 17 millions de déficit).

La capitale du canton a investi 80 millions de francs dans le stade de la Tuilière pour le bonheur des footballeurs, et on s’en réjouit. Pour la culture, près de 30 millions ont été attribués au Pôle muséal Plateforme 10 sur un total de près de 190 millions (sans coût de fonctionnement). 

Et pour la petite histoire, au siècle dernier, la transformation des Galeries du Commerce en Conservatoire avait coûté 35 millions de francs de l’époque (L’Hebdo, 7 décembre 1989), soit 50 millions actuels, coût réparti entre ville et canton. Sauvé de la destruction par un mouvement populaire dans les années 80, cet édifice est un des bijoux de notre cité qu’on admire chaque fois qu’on le traverse.

De par les valeurs qu’elle représenterait dans différents domaines, en terme de développement durable en particulier, la création d’une halle gourmande pourrait bénéficier d’un engagement important de la part du canton. Investir dans une telle infrastructure au coeur de la ville nous paraît dès lors capital pour l’avenir de Lausanne.